Dernière mise à jour: 8 avril 2021
Le cadre législatif roumain (l’OUG no 132/2020), qui a mis en place le fameux dispositif allemand « kurzarbeit », qui permet aux employeurs de réduire, sous certaines conditions, le temps de travail des salariés et aux salariés concernés par cette mesure de bénéficier d’une indemnité payé par l’Etat, a été significativement modifié par la Loi no 58/2021, publiée au Journal Officiel no 345 du 5 avril 2021.
Depuis son entrée en vigueur, le 10 août 2020, l’OUG no 132/2020 a subi différentes modifications, de sorte que la mise en place des dispositions légales était devenue problématique pour les entreprises, surtout en raison de l’ambiguïté des textes législatifs. Dans ce contexte, le Parlement a adopté la Loi no 58/2021 qui apporte certaines clarifications et, en même temps, simplifie la bureaucratie qui incombe aux employeurs.
Ci-après les principales modifications apportées par la Loi no 58/2021:
1) Réduction du temps de travail
Selon les nouvelles dispositions légales, l’employeur peut diminuer le temps de travail (journalier, hebdomadaire ou mensuel) du salarié, tel que prévu dans son contrat de travail, pour maximum 80%, pour une période d'au mois 5 jours ouvrés, pendant les 30 jours calendriers à compter du premier jour de la mise en place de la mesure de réduction du temps de travail. Avant l’entrée en vigueur de la loi no 58/2021, l’employeur pouvait réduire le temps de travail du salarié pour maximum 50%, pour une période d’au moins 5 jours ouvrés par mois.
Cependant, dorénavant, pour pouvoir réduire le temps de travail, l’employeur doit obtenir l’accord de l’organisation syndicale ou, en l’absence de celle-ci, l’accord des représentants des salariés.
A noter que, selon la loi, l’organisation syndicale autorisée à donner son accord sur la mesure de diminution du temps de travail est la structure qui a droit de participer à la négociation collective, telle que prévue par la Loi no 62/2011.
A noter aussi que les anciennes règlementations ne contenaient pas l’obligation d’obtenir l’accord de l’organisation syndicale par l’employeur. Cependant, cette obligation était sous-entendue étant donné les documents que l’employeur était tenu de présenter aux autorités, s’il voulait bénéficier de l’aide financière offerte par l’Etat.
Les salariés concernés par la mesure de diminution du temps de travail ont droit à une indemnité à hauteur de 75% de la différence entre le salaire brut inscrit dans le contrat individuel de travail et le salaire brut de base correspondant aux heures effectivement travaillées. Cette indemnité vient compléter les revenus salariaux dus, calculés sur la durée effective du travail.
2) Conditions obligatoires à remplir par l’employeur pour réduire le temps de travail
- la réduction temporaire de l'activité de la société, comme suite à la déclaration de l'état d'urgence /d'alerte ;
- la mesure vise au moins 10% du nombre total de salariés de l'entreprise ;
- la réduction de l'activité est justifiée par une diminution d’au moins 10% du chiffre d’affaires (1) du mois précédant l’application de la mesure de réduction du temps de travail OU (2) du mois antérieur au mois précédant la mesure de réduction du temps du travail, par rapport au mois similaire de l’année précédente ou à la moyenne mensuelle du chiffre d’affaires de l’année précédant la déclaration de l’état d’urgence/d’alerte, respectivement 2019.
Dans le cas des ONG ou des PFA, des entreprises individuelles et entreprises familiales, la diminution est liée aux revenus réalisés.
La nouvelle loi prévoit aussi la possibilité de bénéficier de ce dispositif de soutien offert par l’Etat pour les sociétés créées entre le 1er janvier et le 15 mars 2020 et qui ont au moins un salarié. Dans leur cas, la diminution de 10% du chiffre d’affaires est rapportée au chiffre d’affaires réalisé le mois précédant l’application de la mesure de diminution du temps de travail.
3) Formalités et restrictions
Information / communication de la décision de diminution du temps de travail
La loi no 58/2021 maintient l’obligation de l’employeur de porter à la connaissance de chaque salarié concerné, par une décision, la mesure de réduction du temps de travail, au moins 5 jours avant l’entrée en vigueur de celle-ci.
Cependant, dorénavant, l’employeur n’est plus tenu de recueillir l’accord du salarié (en vertu des dispositions de l’art 41 (3) let. f) du Code du Travail), mais il doit lui communiquer sa décision via les moyens de communications habituels mis en place. Aussi, l’acte remis au salarié doit indiquer le programme de travail, sa répartition journalière, ainsi que les droits salariaux.
Une autre nouveauté introduite par la loi de 2021 est la possibilité de modifier le programme de travail du salarié, chaque fois que cela s’impose. L’employeur ne doit plus obtenir non plus l'accord du salarié, mais il doit avoir l’accord de l’organisation syndicale ou des représentants des salariés.
Octroi des bonus
Une clarification nécessaire a été apportée quant à l’octroi de bonus à la structure de management de la société.
Ainsi, en plus du salaire de base prévu dans le contrat de travail, l’employeur ne peut accorder des primes ou d’autres bonifications aux personnes qui assurent la direction et/ou l’administration/la gérance (« administrarea ») de la société, selon la Loi no 31/1990.
Des primes peuvent être accordées seulement après la période d’application de la mesure de réduction du temps de travail.
Par contre, la législation prévoit maintenant que l’employeur peut compléter le montant de l’indemnité payé par l’Etat (75% de la différence entre le salaire brut inscrit dans le contrat individuel de travail et le salaire brut de base correspondant aux heures effectivement travaillées) avec des sommes représentant la différence jusqu’à la concurrence du salaire de base correspondant à l’emploi occupé par le salarié.
Interdictions concernant l’employeur
Lors de la réduction du temps de travail, l’employeur n’est pas autorisé de :
- conclure de nouveaux contrats de travail pour l'exercice d'activités identiques ou similaires à celles fournies par les salariés dont le temps de travail a été réduit ou bien de sous-traiter les activités exercées par ceux-ci, interdiction applicable pour l’agence, la succursale ou par les autres sièges secondaires de l’entreprise, tels que définis par la Loi des sociétés no 31/1990 où la mesure a été appliquée ; Selon les nouvelles dispositions légales, cette interdiction ne s’applique pas pour les postes où il est nécessaire de remplacer les salariés dont les contrats ont cessés de droit (art 56, Code du Travail) ou bien comme suite à la démission (art. 81, Code du Travail) ou selon l’art. 61 Code du Travail (licenciement pour motifs imputables au salarié) ;
- réduire le programme de travail des salariés déjà concerné par la mesure, selon l'art. 52 par. (3) du Code du travail ;
- permettre l'exécution de travaux supplémentaires ou en régime de télétravail, en dehors du programme de travail réduit, par les salariés concernés par cette mesure;
- initier des licenciements collectifs.
Enfin, la loi 58/2021 a allégé la procédure du décompte que doit effectuer l’employeur pour bénéficier de l’aide offerte par l’Etat. Ainsi, par exemple, l’obligation de présenter, entre autres, la balance comptable a été remplacée par l’obligation de déposer une déclaration sur l’honneur.
En pratique, la facilité offerte aux employeurs de réduire le temps de travail aura certainement un impact positif dans certains domaines d’activité, mais son applicabilité reste limitée à la période de l’état d’alerte, ainsi que pendant les 3 mois qui suivent la fin de l’état d’alerte, sans tenir compte du fait que le redressement d’une entreprises est souvent beaucoup plus long.